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CAP Liberté de Conscience - Liberté de religion - Liberté thérapeutique

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L'anti-sectarisme est un leurre et un attrape-nigaud
Guy Delaunay

 

 

« Le courage c'est de rechercher la vérité et de la dire ; c'est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe et de ne pas faire écho de notre âme, de notre bouche, de nos mains aux applaudissements imbéciles, aux hués fanatiques (1). »
Jean Jaurès (1903)

De l'objet « secte » à la liste

D'où provient dans notre société française cette préoccupation de nos élites, qui confine à l'obsession d'affirmer, comme une incantation, que les groupes minoritaires (thérapeutiques, spirituels, écologiques... ) seraient potentiellement des sectes et leurs animateurs de dangereux gourous ou des chefs terroristes ?
Partons de la réflexion de Julien Coupat, dans l'interview donnée au journal le Monde le mardi 26 mai dernier, deux jours avant sa libération. Voici ce qui a été rapporté par les journalistes :

« L'antiterrorisme, contrairement à ce que voudrait insinuer le terme, n'est pas un moyen de lutter contre le terrorisme, c'est la méthode par quoi l'on produit, positivement, l'ennemi politique en tant que terroriste. Il s'agit, par tout un luxe de provocations, d'infiltrations, de surveillance, d'intimidation et de propagande, par toute une science de la manipulation médiatique, de l'"action psychologique", de la fabrication de preuves et de crimes, par la fusion aussi du policier et du judiciaire, d'anéantir la "menace subversive" en associant, au sein de la population, l'ennemi intérieur, l'ennemi politique à l'affect de la terreur. »

Ces termes peuvent être repris mot pour mot concernant la lutte anti-sectes en France.

Les associations anti-sectes, orchestrées par la Miviludes(2) , soutenues et encadrées par les ADFI et autres CCMM ou Info-sectes ne justifient leur existence (et donc leurs subventions publiques) qu'en affirmant qu'il y a des sectes. C'est le fait qu'elles existent qui amènent brusquement à cataloguer des groupes ou communautés en sectes ; plus encore, « l'antisectarisme » n'est pas le moyen de lutter contre les sectes, c'est le moyen de construire l'objet secte. Financées par l'État et les Collectivités Locales, il est nécessaire pour le fonds de commerce de ces associations et leur survie de trouver un ennemi. Un exemple ? « Rappelons que depuis un an, l’Adfi Île de France reçoit une subvention de 35.000 € par an pendant 3 ans, (DDASS: 10.000 €, Région, 17.000 €, Ville de Paris : 8.000 €), » pour établir la liste « des gourous, déguisés en thérapeutes, psychanalystes, psychologues, professeurs de Zen ou de Yoga, médiums et voyants … » car « la méconnaissance de ces outils ne permet pas à un public vulnérable de faire la différence entre le charlatanisme des sectes et le professionnalisme médical. (3)» « Une nouvelle liste « noire » verra t-elle le jour ?(4)»

Le sociologue Antoine Garapon écrit dans la revue Esprit de Juillet 2009(5) : « L'enlistement est une manière d'isoler […] L'objectif est de déconnecter les suspects et donc de les neutraliser : il est donc délibérément préventif ; d'où une certaine confusion voire une mystification car la décision d'inscrire sur une liste ne requiert pas un niveau de preuve identique à celui qu'il faudrait pour condamner. Le listing appartient donc à ces mesures dites préventives qui consomment la peine avant même la condamnation – en dehors de tout procès ; prévention et peine s'entrechoquent jusqu'à ne faire plus qu'un en évacuant le moment de la justice […] D'autant que la liste concerne non pas des actes mais des personnes […]. Le centre de gravité de cette logique n'est plus un repérage des actes mais un ciblage des personnes dans le but d'introduire une ségrégation entre les parias et les partenaires, à l'exclusion de toute position tierce. »

Cette analyse très fine appliquée à l'étude du monde de la « toile », peut être reprise mot pour mot dans les tentatives d'isoler les minorités et d'éliminer de notre monde policé-policier, par une suspicion généralisée, le recours au tiers, à la référence, à la loi, à la justice. Nous apprenons, au passage, dans cet article que certains « sanctuaires » jusqu'alors préservés comme les cabinets d'avocats disparaissent, ceux-ci étant tenus de dénoncer toute opération suspecte sans « avoir le droit d'informer leur client ! » Il est vrai que des actes de manipulations ou de perversions peuvent se dérouler dans un groupe mais n'est-ce pas commun à tout rassemblement humain ? Du collège au parti politique en passant par la famille, il n'existe pas de vaccin anti-manipulation. La confusion - en France - est d'accuser les groupes minoritaires (ceux qui ne sont pas reconnus par les pouvoirs en place, politiques ou religieux) d'être dangereux, sans enquêtes ni recherches préalables et de les considérer, a priori, comme un ennemi intérieur.

Combien de groupes minoritaires spirituels ou thérapeutiques ou simplement en marge de cet ordre actuel qu'on veut nous imposer à tout prix, se retrouvent catalogués comme « groupe sectaire ou terroriste » souvent au seul motif que d'anciens adeptes affirment en être victimes, ou alors parce qu'ils dérangent. Mais qui troublent-ils, quel ordre mettent-ils en péril ? Les arguments avancés par ces tenants de la Défense de la Famille et de l'Individu (ADFI), font appel aux plus bas instincts de méfiance, de suspicion contre « l'étranger » qui ne se conduit pas « normalement », c'est-à-dire comme le veut le « politiquement-correct ». Les apostats, ceux qui changent d'avis, sont non seulement toujours considérés comme des victimes, des pauvres gens sans défense qui ont été abusés mais ils ont systématiquement raison pour l'appareil policier et judiciaire. Pourquoi cette législation « victimaire » taillée sur mesure pour les plaignants ? Autant de questions auxquelles il n'est jamais répondu.

Dans les lignes qui suivent, nous allons nous arrêter sur ce cas particulier à la France : la lutte anti-sectes, pour essayer de comprendre et si possible d'en démonter les mécanismes.

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De la victime à la gestion des masses

Aucun adulte, normalement constitué, ne peut se dire victime de ses propres engagements avec le corrélat que nul autre, que lui-même, ne peut en être tenu pour responsable ; et même si on change d'avis ; et même si on pense que l'on a été séduit ou endoctriné, il n'en demeure pas moins qu'il faut, par souci de la vérité ou simplement par honnêteté, se demander : quelles questions personnelles, quelles demandes affectives avons-nous reportées sur quelqu'un, par impossibilité d'y faire face, par peur ou manque de confiance ? Pourquoi avons-nous érigé quelqu'un en place de « savoir-pour-nous » ? Nous pouvons, sans risque de nous tromper, affirmer que les relations humaines, dans un couple ou une famille, voire entre amis, se construisent de ce genre d'échanges et d'influences, et comme le remarquait une sociologue, les relations sentimentales rendent vulnérables et parfois un peu idiot et l'on ne condamne pas pour autant "les amoureux" (6)» .

Il peut venir un moment où on s'émancipe d'un système, ou d'un groupe, où l'on peut même penser qu'on n’aurait pas dû y rester voire y entrer, attitude normale et compréhensible. Ce qui l'est moins c'est le reniement de ce groupe ; ce faisant, c'est l'oubli de sa propre histoire, de son cheminement singulier qui est en question. Crier à la manipulation, à l'influence, à l'impossibilité de se libérer d'une emprise redoutable..., c'est trouver un écho dans les dénégations des dignitaires nazis, à Nuremberg, qui employaient ces mêmes arguments pour se défendre, seule changeait la forme : « ils ne savaient pas, ils n'avaient fait qu'obéir, tout le monde faisait de même... ». Il est, toujours, plus facile de trouver un bouc émissaire que d'assumer ses actes et de se reconnaître participant.

A partir de ce moment-là, comme dans un divorce qui se passe mal, tous les arguments sont utilisés : une gifle à un enfant se transforme en brutalités quotidiennes, des disputes en abus de faiblesses, des partages d'argent en abus de biens sociaux …

Se déclarer « victime » devient une façon privilégiée de se faire entendre de la justice au risque d'une perversion dangereuse. Convertir un citoyen en victime, en absolvant, par avance, sa conduite, c'est le placer hors de la loi ; il n'est plus sujet de la justice ni de la loi. Il est victime, lui-même, du processus qu'il déclenche ; être victime remplace l'identité ; être victime défait l'histoire singulière. Ce n'est plus une personne puisque la suspicion d'être sous influence porte le doute sur tous les actes personnels. Ce qui convient très bien à un état policier, à qui il est plus facile de gérer des « victimes » qui s'en remettent à ses directives, qui attendent tout de lui, que des citoyens qui interrogent et s'insurgent. L'étymologie nous en apporte une confirmation éclatante : « victime, homme ou animal offert à la divinité. Du latin victima : victime immolée de la main du vainqueur ou encore, animal de sacrifice expiant pour ses fautes et celles des autres. » Il est bien sûr inutile de se demander quelle est la divinité en question ? Les fautes à expier ont des noms multiples, la réflexion, l'autonomie, la dissidence, la désobéissance, le refus du « prêt-à-penser »...

Il est vrai que tout échange, tout appel, toute question adressée à quelqu'un comprend un risque. Risque de se tromper, d'investir une personne d'une « demande affective » - sentiment souvent au départ d'une démarche personnelle ou spirituelle ou plus simplement d'une vie de couple - mais ce n'est pas la multiplication des contrôles, de la répression, qui peut régir la vie, dicter les choix, empêcher les erreurs. N'oublions pas ce que Benjamin Franklin déclarait vers 1780 : « Celui qui est prêt à sacrifier un peu de liberté pour obtenir un peu de sécurité ne mérite ni l'une ni l'autre. » Il est avéré que tous les gouvernements qui ont fait de la sécurité un slogan électoral, pour cacher, éliminer les vrais problèmes que sont le chômage (en particulier des jeunes), la politique par rapport aux gens âgés, le traitement infligé aux travailleurs, la destruction des ressources naturelles, l'état des prisons, des universités, des hôpitaux (notamment psychiatriques) ... ont restreint la liberté de leurs concitoyens, sans leur apporter une once de sécurité supplémentaire.

Citons quelques auteurs qui se sont intéressés à la question avec trois citations pour illustrer des moments différents du cheminement humain :

- la construction du sujet, (l'inconscient)
- le rôle de la société ou des groupes sociaux, (le social)
- la dépendance au pouvoir, (la loi)

« Le paradoxe de la condition humaine, c'est qu'on ne peut devenir soi-même que sous l'influence des autres. » Boris Cyrulnik (Les nourritures affectives),

« Il n’y a en littérature qu’un sentiment absolument sot : c’est la peur d’être influencé. » Jean Paulhan, « Le trafic d'influences constitue le pain quotidien du pouvoir. » Jacques Attali (Verbatim III)

Si ces trois aspects s'interpénètrent et fonctionnent simultanément, arrêtons-nous sur le dernier. Il amène une dimension supplémentaire : « le trafic d'influences » comme instrument privilégié du pouvoir. Cela lui sert à se perpétuer, mieux, à assujettir chaque citoyen à un discours unique, celui du progrès et du « bien-qu'il-veut-mettre-en-place-pour-chacun ». Il est évident qu'il ne peut pas accepter de concurrence, de brèche dans ce monopole. Il est interdit de penser autrement, d'aspirer à un autre idéal que de simplement consommer selon les normes imposées. Deux questions restent ouvertes : de quel bien s'agit-il et pour le profit de qui ?

Que certains mouvements comme l'Ordre du Temple Solaire puissent être dangereux, peut-être, mais cette question est largement dépassée à l'heure actuelle. Cette mise en avant sert au pouvoir à manipuler les peurs et à aménager une répression intérieure contre ses propres citoyens en élaborant des lois iniques. La France est devenue subitement un terreau où fleurissent, comme la mauvaise herbe au printemps, des « sectes » innombrables. Les lois habituelles de la République se révèleraient insuffisantes pour condamner tout manquement à l'ordre social et républicain et le Parlement nous concocte des lois et décrets d'exception comme celle qui porte le triste nom de ses promoteurs, la loi About-Picard de 2001.

En contre-exemple, examinons la réponse des autorités suisses lorsque 48 membres de l'Ordre du Temple Solaire sont retrouvés morts dans deux cantons paisibles du Valais et de Fribourg en 1994. « Comme on peut l'imaginer l'émotion est grande dans tout le pays et relance la question de la dangerosité des minorités spirituelles […] Ce qui est rassurant c'est que dix ans plus tard, on peut constater que la seule proposition (à la demande du Département de Justice et de Police) qui a abouti est la création d'un Centre Inter-Cantonal sur les Croyances et à ce jour il n'existe aucune réglementation, ni au niveau fédéral, ni au niveau cantonal, sur les sectes, certains de le déplorer, la majorité de s'en satisfaire. »

Quelques années plus tard, en 1999, le Parlement helvétique s'inquiète que « le pays soit le plus touché - avec la Grande Bretagne - par la multiplication des mouvements à caractère religieux ». Une campagne médiatique se déroule même sur ce thème « porteur », dans les médias et sur les ondes. Malgré cette pression, le gouvernement fédéral a répondu, sèchement, que le Droit en vigueur était tout a fait suffisant(7) .

« Vérité en deçà des Alpes, erreur au-delà !... »

Depuis, la « patrie des droits de l'homme » a fait mieux et continue toujours plus loin dans la répression ; dans la ligne de mire sont visés tous les mouvements thérapeutiques et même simplement les professionnels psy, non estampillés(8) … Ils vont devoir « s'encarter » auprès des Préfectures pour avoir le bon « label républicain », le psy qui guérit en conformité aux lois de la République, mais pour quelle finalité ? De plus, les instituts qui les formeront doivent être agréés par la République ! Plus d'échappatoire, que de bons citoyens conformes, dociles, dans leur angoisse ou leur mal-être et même dans leur guérison ! L’ordre Républicain a disparu de nos urnes et même du Parlement. Comment expliquer autrement qu’un texte de loi rejeté(9) par les députés, c’est-à-dire les représentants du peuple, est représenté parce que le résultat du vote a déplu au pouvoir en place ? Julien Coupat parlait de la fusion entre le judiciaire et le policier, celui entre le législatif et l’exécutif est aussi préoccupant. Les députés de l'opposition, en manquant d'honneur (il leur suffisait de boycotter l'Assemblée Nationale !) ont manqué l'occasion de véritablement redevenir nos représentants.

La législation française aussi est suffisante - comme en Suisse – pour réprimer tout manquement à l'ordre social, alors pourquoi construire - au niveau législatif comme répressif - une machinerie pour écraser un danger qui reste d'abord de l'ordre du fantasme ? Nous sommes obligés de nous demander dans quel but ?

Il n'est plus question de droit ni de justice, seulement de gestion des masses, pour qu'elles restent silencieuses ou plus exactement qu'elles continuent à croire qu'il n'y a pas d'autres solutions que dans le modèle proposé. Il est symptomatique que la plupart des « remèdes » financiers apportés à la crise actuelle consistent en un soutien aux industries polluantes, remises en cause par l'état de la planète, comme les entreprises pétrolières ou automobiles par exemple … Tout est mis en œuvre pour un « faire croire » mortifère et une fuite en avant. Les plans « écologiques » qui devaient se mettre en place pour tenter de préserver notre planète, notre avenir, celui de nos enfants et petits-enfants, risquent d'être suspendus voire même supprimés pour cause de crise, pour ceux, du moins, qui avaient reçu un début d’application.

Mais d'où provient cette dichotomie entre les textes fondamentaux de la République, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen … et la répression banale, quotidienne, étouffante qui nous enferme chaque jour un peu plus ?

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Le bonheur est la satisfaction de tous

Jacques Lacan écrivait en 1986 : « L'affaire n'est pas autrement facilitée par le fait que le bonheur est devenu un facteur de la politique […] Il ne saurait y avoir de satisfaction d'aucun, hors de la satisfaction de tous. »(10) Alexis de Tocqueville avait déjà noté, en 1840, que la devise républicaine : Liberté, Égalité, Fraternité, ne laissait place à aucun doute quant à son évolution. La liberté est difficile à atteindre, la fraternité impossible à mettre en œuvre, il reste l'égalité vers laquelle les hommes vont se précipiter avec toutes les déviations et effets pervers que nous voyons se développer de plus en plus sous nos yeux. En effet, comme l'égalité n'est jamais entièrement réalisée, les citoyens en retirent une frustration qui les pousse à solliciter toujours… plus d'égalité. Tocqueville se demande alors si cet amour pour l'égalité ne va pas détruire la liberté. Les peuples démocratiques « ont pour l'égalité une passion ardente, insatiable, éternelle, invincible ; ils veulent l'égalité dans la liberté, et, s'ils ne peuvent l'obtenir, ils la veulent dans l'esclavage »(11) . Comment expliquer que l'égalité puisse devenir liberticide ? L'uniformisation des conditions d'existence conduit au matérialisme et à l'individualisme. Ce repli sur la sphère privée est dangereux pour « la pérennité du fait démocratique ». Occupés à régler leurs affaires, les « individus des temps démocratiques » tombent dans une « mollesse intellectuelle » et négligent le débat public. Ils sont prêts à s'en remettre à un État « immense et tutélaire ». Tocqueville continue en affirmant que l'oubli des vertus civiques peut permettre à un despote de s'installer au pouvoir. La course à l'égalité conduit à la « tyrannie de la majorité » et réduit la liberté... Il découvre la misère et l'exploitation, y compris de très jeunes enfants, dans les fabriques de la nation la plus industrialisée de l'époque, la Grande Bretagne, et conclut que l'égalité peut aboutir à la création d'un « monstre social ».

Tous pareils, tous consommateurs, chaque citoyen doit avoir les mêmes chances pour vivre. Nous savons que cela est impossible ; plus de deux siècles après la Révolution Française, il n'y a jamais eu autant de différences : de plus en plus de Français, même avec un travail, se paupérisent. La grandeur utopique de la devise républicaine reposait sur un équilibre impossible des trois éléments. Mettre l'accent uniquement sur l'égalité autorise toutes les exactions, « la tyrannie de la majorité » avec en corollaire l'élimination de tout ce qui est différent, la peur de l'étranger, de ce que nous ne comprenons pas et qui sert d'alibi, de masque et de bouc émissaire pour renvoyer l'égalité impossible aux « lendemains qui chantent ».

Dans le séminaire sur l'Éthique, Lacan démontre que la recherche du bonheur nous entraîne de plus en plus aujourd'hui vers l'assujettissement au service des biens. « Une part du monde s'est orientée résolument dans le service des biens, rejetant tout ce qui concerne le rapport de l'homme au désir – c'est ce qu'on appelle la perspective post-révolutionnaire. La seule chose qu'on puisse dire, c'est qu'on n'a pas l'air de se rendre compte qu'en formulant ainsi les choses, on ne fait que perpétuer la tradition éternelle du pouvoir, à savoir – Continuons à travailler, et pour le désir vous repasserez […] En d'autres termes cette opération ne se justifie que pour autant que nous avons à l'horizon l'État universel. »(12)

Remplaçons cet État cité par Lacan par la Mondialisation et nous y sommes, avec les accents exclusifs du commerce et de la finance, le « monstre social » devient planétaire. La vie personnelle est régentée et soumise au profit avec, à l'horizon, une société ultra-sécuritaire mondialisée. Ce qui est sacrifié sur l'autel de cette « modernité », c'est le sujet humain, l'homme avec ses désirs, ses aspirations, et même ses besoins élémentaires (13) .

Le « dieu profit » dévore tellement ses enfants qu'en Afrique, 30 millions d'hectares de terres arables sont cédées à vil prix par les gouvernements qui spolient leurs propres habitants en profitant du fait qu'ils ont rarement des titres de propriété dûment enregistrés. 30 millions, c'est l'équivalent des terres fertiles de France !, qui sont achetées par des pays étrangers (USA, Chine, Afrique du Sud...) pour des cultures intensives (thé, coton, café …) dont les paysans dépouillés ne verront pas les bénéfices. En 1980, la paysannerie africaine s'auto-suffisait en matière alimentaire dans la plupart des pays ; depuis 2006 des émeutes de la faim ont lieu régulièrement et les secours promis par les pays riches arrivent au compte gouttes. Si en Afrique (et dans d'autres pays du Sud) le monstre dévore ses enfants au « grand jour », émeutes de la faim, guerre entre ethnies ou inter-confessionnelles … Comment réagit notre Occident policé ? Cela ne va pas sans heurts ; toute proportion gardée, il y faut aussi son lot de victimes, de boucs émissaires pour détourner la vague de haines, de peurs générées par un tel massacre et pour dissimuler l'opération en cours. Nos hommes politiques et autres manipulateurs en coulisse, certains parfaitement conscients, d'autres, serviteurs d'une structure qui leur échappe, montrent beaucoup d'inventivité.

Nombre de chercheurs le démontrent : devant les problèmes insurmontables de notre époque, pour donner le change, chaque État s'invente un « ennemi intérieur » qui sert à canaliser les ressentiments et les frustrations de ses citoyens. Aux USA, le terrorisme fait l'affaire, cela a conduit ce pays, à partir de mensonges et de dissimulations, à l'invasion de l'Irak et à la création d'une prison spéciale : Guantanamo qui est située hors du territoire national ; son fonctionnement implique une double négation de la loi concernant non seulement les détenus mais aussi les gardiens. Les premiers sont hors la loi d'abord du fait de leurs actes terroristes, réels ou présumés, mais aussi parce qu'ils ne sont pas justiciables de la loi commune mais de mesures d'exception. De même les gardiens n'appliquent pas la loi habituelle des États de l'Union mais en outre ils sont exonérés de toutes poursuites malgré des actes de torture, de barbarie…

Nous constatons la même perversion : à « ennemi intérieur », « lois d'exceptions » et immunité pour ceux qui les appliquent.

Et en France ?

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La manipulation étatique « ordinaire » à la française

Examinons, à l'aide d'un exemple, le fonctionnement de cette manipulation grossière et comment, partant d'un mensonge, l'État fabrique une vérité. N'oublions pas que le premier ministère de la Propagande fut inventé par les nazis, c'est l'ancêtre (le modèle ?) de nos ministères de l'Information.

Résumons brièvement les faits, dûment enregistrés par la très officielle chaîne de télévision parlementaire (LCP Assemblée Nationale). (14)

La Commission Parlementaire sur les Sectes, dirigée par Monsieur Fenech (15), interroge, en octobre 2006, des hauts fonctionnaires de différents ministères : Inspecteurs Généraux, Directeurs de Services ou Chef du Bureau des Cultes au ministère de l'Intérieur ... pour connaître le nombre des dossiers qu’ils ont à traiter sur les enfants « victimes des sectes », afin de protéger nos chères têtes blondes qui seraient en danger.

Extraits du dialogue entre la Commission Parlementaire et les fonctionnaires :

Monsieur Fenech : « On nous a cité le chiffre de 80 000 enfants qui seraient en danger ... »

1 - Réponse de l'Autorité Judiciaire : « Oui, sauf qu'en 2002, 2003, 2004, quand nous avons mené cette enquête, nous avons recensé 192 signalements directs ou indirects et pas un de plus ». Le fonctionnaire doit insister devant la pression des membres de la Commission : «... pour un certain nombre de dossiers la problématique est indirecte, c'est-à-dire que nous n'en sommes même pas sûrs ! »

2 - Réponse des Inspecteurs Généraux de l'Éducation Nationale : « Nous avons interrogé les Inspecteurs d'Académie, les parents d'élèves, parmi ces enfants en danger nous avons demandé le nombre de ceux qui l'étaient à cause des mouvements sectaires, ils nous ont répondu qu'il y en avait 8 ! »

Monsieur Fenech, troublé, revient à la charge : « Sur les 19 000 signalements, auprès des Parquets des enfants en danger, vous me dites que 8 seulement concernent le phénomène sectaire. Là, on est en droit de se poser des questions, pourquoi ce chiffre insignifiant ? »

Risquons une réponse, les 18 992 enfants manquants ne seraient-ils pas en danger à cause de leur entourage familial ou social ? Ce qui est clair dans ce reportage, c'est qu'à aucun moment la Commission ne veut regarder la réalité en face et admettre le travail rigoureux des fonctionnaires. La seule question honnête à se poser devant l'insistance des faits serait de se demander : « Et si nous nous étions trompés » ? Devant cette impossibilité de rectitude de nos élus, nous sommes, nous, en droit de nous demander : à quelle fin, dans quel but cette torsion de la réalité ?

Les réponses des hauts fonctionnaires de la République, qui sont filmées, vont toutes dans le même sens, ils résistent fermement à l'intention manipulatrice des élus.

Les membres de la Commission insistent pourtant, ils s’en prennent aux Témoins de Jéhovah, boucs émissaires habituels. Réponse des Inspecteurs Généraux de l’Education Nationale : « Jamais nous n’avons de signalement de parents d'élèves, d'élus sur le comportement des enfants de Témoins de Jéhovah. » Question de Monsieur Fenech qui s’offusque : « Pourquoi ? » Petit sourire de son interlocuteur : « Ils ne sont pas vraiment en danger… »

3 – Arrêtons-nous, pour clore cet échantillon de surdité malhonnête, sur la déposition de Monsieur Didier Leschi, à l'époque Chef du Bureau des Cultes au Ministère de l'Intérieur. La Commission se heurte à sa rectitude, celui-ci répond : « Si les autorités administratives constituent un dossier suffisamment étoffé, nous examinerons ce dossier. Pour l'instant, je ne l'ai pas vu. Je ne suis pas en droit de me substituer à cette absence de preuve .»(16)

Absence de preuves ! Tout ce travail de centaines de fonctionnaires de la République est bafoué, nié, rejeté car, dans le rapport enregistré à l'Assemblée Nationale le 19/12/2006 sous le numéro 3507, Monsieur Fenech annonce sans sourciller, - et il récidive dans les différents journaux télévisés de l'époque - : « de 60 à 80 000 enfants sont en danger, en France, du fait des sectes. » Plus le mensonge est gros, moins les preuves sont nécessaires. C’est une escroquerie intellectuelle, une manipulation délibérée !

La poursuite actuelle contre les minorités, c'est-à-dire tous les groupes qui n'acceptent pas la « vérité officielle », qu'ils soient catalogués comme groupes spirituels, thérapeutiques voire terroristes, comme le groupe de Tarnac, ou autres ne repose que sur un mensonge d'État.

Si quelques voix, ces derniers mois, et non des moindres – celles de Mesdames Mignon et Alliot-Marie, entre autres, (respectivement conseillère auprès du Président de la République et ministre de l'Intérieur), ont tenté de dire que les sectes n'étaient pas un problème en France, elles ont été étouffées et sont vite rentrées dans le rang. « La tyrannie de la majorité », dénoncée par Tocqueville, sert à manipuler sciemment et contrôler les envies, les aspirations de cette même majorité qui n'y comprend rien, qui ne veut pas regarder la réalité ni entendre la vérité.

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De la mollesse intellectuelle à la nouvelle religion et ses hérétiques

Le flou qui entoure la définition du mot « terrorisme », comme le rappelle également Julien Coupat, se retrouve aussi autour du mot secte. Les employés de « l'anti-sectarisme » ont varié dans leurs appellations ; de mouvements sectaires, on est passé à dérives sectaires maintenant aux groupements... Avec secte, le mot lui-même aurait obligé, dans son emploi, à quelques précisions sémantiques, mais avec des expressions floues, comme dérives ou groupes sectaires, dont l'objet ne peut être clairement défini, on reste dans la conjecture, l'extrapolation. L'avantage est que n'importe quelle minorité dérangeante peut ainsi être qualifiée de déviante !

Lors d'une émission de télévision récente sur FR3 (mai 2009), un sociologue, démissionnaire du Comité Scientifique de la Miviludes, énonçait ainsi les raisons de sa démission devant les caméras : « D'abord un manque de définition concernant l'objet auquel s'attaque la Miviludes, ensuite un défaut de méthodologie pour traiter cet objet et enfin l'absence totale d'outils de validation pour mesurer les résultats des travaux. » En bref, il affirmait qu'il ne pouvait pas faire son métier de sociologue pour lequel il était payé. La réponse de Monsieur Fenech, présent sur le plateau, est révélatrice ; d'abord, il se lave les mains en répondant que « ce sont des gens, comme son contradicteur, qui définissent la politique de la Miviludes » (allez saisir une telle hypocrisie) ! Cela ne suffisant manifestement pas, il entonne le couplet bien connu : « Vous n'avez pas vu le drame de ces parents qui ont un enfant dans une secte... » etc. Le sociologue ne peut plus s'expliquer, la parole est mobilisée, les autres invités présents ainsi que le journaliste deviennent des faire-valoir. C'est symptomatique, quand l'un de ces propagandistes est en difficulté, il entonne avec des trémolos dans la voix l'antienne sur la tragédie des pauvres « victimes » et pas un participant n'ose répliquer ! Et la boucle se referme. Quelle justice peut fonctionner sur de telles bases ? Aux faits sont substitués la plainte, les fantasmes, les dires, les émotions, les sensations … Et que des ténors du barreau, des avocats, des magistrats ou ancien ministre s'insurgent, dans une émission de radio diffusée par France Culture, contre cette justice « victimaire », cela ne sert à rien ; seul répond le mépris des politiques.

Un autre signe de ce déni de la vérité par ces propagandistes sectaires est de refuser systématiquement les résultats de tous les travaux scientifiques sur le sujet. Par exemple, Raphaël LIOGIER, Directeur de l’Observatoire du Religieux de l’Université d’Aix-en-Provence, écrit dans le Monde du 3 mars 2008 : « Tous les chercheurs, sans exception, je dis bien tous, quelles que soient leur appartenance partisane ou leurs opinions politiques, tous les spécialistes du religieux sont d'accord depuis trente ans pour dire que les listings établis par les commissions parlementaires ainsi que les prétendues enquêtes des missions interministérielles sont fantaisistes. »

Trente ans, mais qu'est-ce que cela change au discours officiel : rien ! Maurice DUVAL, ethnologue, responsable d'un laboratoire au CNRS, conseille à ses jeunes collègues d'abandonner les études sur les mouvements religieux, pour ne pas ruiner leur carrière. Pendant quatre ans, alors que les différents médias parlaient des turpitudes et des délits commis par la « secte » du Mandarom, sans aucune vérification, ni enquête, il a observé, s'est immergé dans ce groupe. A la fin de son travail, vingt-sept journalistes (presse écrite et parlée, télévision...) devaient en rendre compte. Suite à des pressions sur ces médias « indépendants », il n'y eut aucune interview, aucun article ! Il fut même suspecté d'avoir été influencé et de parler pour la « secte ».

Tout ceci corroboré, vérifié par un chercheur, Susan PALMER, sociologue, qui enseigne la Science des Religions à l'Université Concordia de Montréal et est reconnue comme spécialiste de l'étude des mouvements religieux au Québec. En 2001, elle obtient du Gouvernement Fédéral Canadien une subvention, pour trois années d'études sur « la gestion publique des minorités religieuses en France ». Quelle n'est pas sa surprise de découvrir le tabou qui entoure ces groupes, « comme dans aucun autre pays au monde », reconnaissant que « les chercheurs (français) ne peuvent pas travailler » […] Tous ces groupes minoritaires sont considérés « comme des groupes criminels, un peu comme la mafia. » Elle affirme avoir « eu l'impression que les bureaucrates étaient juste payés pour lutter contre les sectes, mais ils ne prenaient pas la peine de lire quoi que ce soit et n'allaient certainement pas rendre visite à ces groupes. » Elle continue en examinant les documents et la littérature de la MILS (17) écrits par des membres des mouvements anti-sectes et s'avoue « surprise de voir le peu d'informations dont ils disposaient et la façon dont ils avaient négligé d'entreprendre une recherche même la plus élémentaire. » Autrement dit, ces tenants des ADFI et autre groupes fanatiques, soi-disant chargés de la lutte contre les dérives sectaires, font montre d'une inculture et d'une intolérance forcenée qu'ils projettent sur les groupes qu'ils combattent.

Venue d'Amérique du Nord, elle fait la même constatation que Vladimir BOUKOVSKY, sociologue et dissident russe qui s'étonnait, dans les années 1970, de la croyance naïve des Français envers leurs médias. En URSS, écrivait-il, il suffit qu'un périodique donne un avis pour que les gens entendent l'opposé, « nous avons appris à lire entre les lignes » et Susan PALMER ajoute : qu'en Amérique « la prise de conscience existe (de la part des lecteurs) que le gouvernement tente de manipuler les gens à l'aide de la presse .»(18)

D'où provient cet aveuglement ; pire, ces mensonges à répétition ? Susan PALMER rejoint le travail d'Alain BAUBÉROT (19), lorsqu'elle affirme que les participants des nouveaux groupes spirituels français sont vus et entendus comme les « hérétiques de la laïcité. » Celui-ci affirmait à la tribune du Congrès du CICNS à Paris en septembre 2007 : « La laïcité française a repris à son compte, en bonne partie, cette tradition gallicane de surveillance, de domination de la religion par la politique, et en même temps d'officialisation d'une certaine religion – la laïcité - comme religion nationale. »

Il existe des chercheurs, des scientifiques français qui tentent de dénoncer ces amalgames mais, comme l'écrit Raphaël LIOGIER dans l'article cité précédemment, les chercheurs du CNRS ou universitaires, sociologues ou juristes « sont exclus de toute discussion, et enfin accusés de trahir la République ». Pourquoi ? La réponse est évidente : ils trahissent – eux, qui sont payés par les différents ministères - parce qu'ils ne cautionnent pas, de leurs places de scientifiques, le mensonge et la manipulation de l'État !! A la peur, s'ajoute la censure généralisée. La presse et les médias en général doivent marcher à la botte, ne pas dévier du faire-croire habituel et servir de faire-valoir, comme le rapporte également Susan PALMER, suite à ses contacts avec des journalistes français.

Écoutons, une dernière fois, Monsieur FENECH pour qui le mensonge est la vérité. Interrogé, sur l'antenne de FR3, en décembre 2006, il déclare, à propos de la Commission Parlementaire sur les Sectes, sur un ton lénifiant et condescendant (20): « Nous avons respecté totalement le contradictoire, nous avons adressé des questionnaires à toutes les communautés concernées, elles ont eu tout le loisir de nous répondre, tout est bien clair. »

Question de la journaliste : « Donc, concernant les Témoins de Jéhovah, contrairement à ce qu’ils disent, vous avez discuté avec eux, vous les avez entendus ? »

Réponse : « Mais on ne discute pas avec des communautés sectaires, on prend acte de leurs actes et lorsqu’ils franchissent la ligne jaune, c’est-à-dire la loi républicaine… »

La présentatrice n'a pas relevé la contradiction et le mensonge. Mais à invoquer un soi-disant modèle républicain comme rempart, celui-ci n'existe plus, il disparaît sous nos yeux. Que pesons-nous devant une telle perversion, face à une telle forfaiture ? Car bien entendu, il se garde bien de rectifier que, depuis son intervention, la Cour de justice Européenne a donné raison aux Témoins de Jéhovah et débouté l'État français.La loi « souillée » :

Quand Monsieur Fenech parle, sur FR3, de « franchir la ligne jaune, c'est-à-dire la loi républicaine », ce n'est certes pas celle qui affirme que :

(...) L’unanimité et la clarté règnent lorsqu’il s’agit pour le juge d’affirmer que le religieux relève du for interne de l’individu. Rappelant qu’« en France, le principe de la liberté de conscience et de culte doit prévaloir », « que les libertés religieuse, de croyance, d’opinion, d’expression sont constitutionnellement garanties », le juge précise à maintes reprises que « la croyance fait partie de la sphère individuelle », qu’« il s’agit d’un domaine privé ressortissant à la liberté de conscience ». A ce titre, le juge ne saurait « émettre quelque avis que ce soit quant à l’appartenance d’un parent à un groupe religieux, fût-il habituellement qualifié de secte » .(21)

(...) Les juges s’interdisent de faire produire au religieux de quelconques conséquences juridiques : ainsi, « l’appartenance de la mère à une association spirituelle » (dont le juge précise par ailleurs qu’elle est répertoriée comme mouvement sectaire par la commission d’enquête parlementaire sur les sectes) « ne saurait à elle seule motiver le transfert de la résidence habituelle des enfants chez le père » ; le juge ne doit pas « prendre quelque décision que ce soit qui reviendrait à sanctionner ce parent pour cette appartenance » (à une secte) . Ou encore, il doit « être admis en principe qu’une croyance religieuse quelle qu’elle soit ne peut en elle-même être constitutive d’un comportement fautif ». D'après Vincente Fortier, directeur de recherche à l'Université de Montpellier. Extrait de "Le juge, gardien du pluralisme confessionnel".(22)

La loi républicaine est-elle donc bafouée ? Pour les laquais hypocrites de l'État, certes pas, elle s'applique mais uniquement pour les citoyens bien-pensants, dans la norme ou qui ne veulent pas savoir ; elle n'est pas destinée aux ennemis de la République. Et la législation française a créé, avec l'appui d'associations reconnues d'Utilité Publique, des lois d'exception qui désignent un ennemi intérieur parmi ses propres citoyens. Citons, parmi d'autres, Roger IKOR, fondateur du CCMM (23) : « Il faut cogner, détruire ces sectes qui pullulent sur notre pourriture. Quand suffisamment de gens iront mettre les locaux des sectes à sac, ils [les pouvoirs publics] remueront sans doute. » Que l'article 20 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme des Nations Unies, du 10 décembre 1948, stipule que : « Toute personne a droit à la liberté de réunion et d'associations pacifiques », ne l'empêche pas d'affirmer : « Si nous nous écoutions, nous mettrions un terme à toutes ces billevesées, celles des sectes, mais aussi celles des grandes religions. » Répondant à une remarque, de bon sens, d'un journaliste qui demande : « J'aimerais comprendre pourquoi on essaie de soustraire une personne à ses croyances ? » Alexandra SCHMIDT, ex-porte-parole de l'ADFI répond : « Toute l'ADFI était basée là-dessus. »

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Arrêtons là ce florilège de la bêtise et de la haine quotidienne… Le but poursuivi est toujours le même, restreindre les libertés individuelles, désigner un ennemi intérieur et laisser à une entité étatique le soin de décider à la place des individus, au nom de l'égalité. Le « monstre social » renforce son emprise !

Ce genre d'agissements et de réflexions fait tache d'huile et échappe même à ses propagandistes en envahissant tous les comportements sociaux. L'illustration est l'escalade, dans les moyens, du traitement des différends entre citoyens. Des groupes minoritaires, soi-disant (prétendus ?) « sectaires et dangereux », nous passons aux cours de récréation. Il est symptomatique que le seul recours invoqué par des parents, lors d'un racket à l’école primaire « mettant en cause des enfants de 7 ou 8 ans », est le recours à la gendarmerie, à la répression armée ! Les relations sociales et les fonctions des parents, des enseignants ... succombent sous nos yeux au profit de la seule sanction policière.

Mais l'exemple vient de haut, du Président de la République. Le personnage en charge de représenter le registre symbolique, qui donne corps au lien entre les citoyens, le bafoue chaque jour un peu plus. Sous les oripeaux moisis de l'Ordre Républicain se cache désormais un Ordre policier, répressif qui, habilement, se choisit des boucs émissaires pour mettre en place ses méthodes, sa manipulation, ses tribunaux, ses agents. Et que ces boucs émissaires se nomment le « Groupe de Tarnac », catalogué « association de malfaiteurs », ou la communauté de la Balme, qualifiée de « secte », qu’importe, tout est bon. Notons, avec tristesse, que déjà en 1992, nous avions été quelques-uns condamnés à 3 mois de prison avec sursis, sous ce même chef d’inculpation « association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un crime » et cela pour une bagarre ridicule entre quelques éducateurs, le tout assorti d'une amende à payer au Trésor Public de 234 francs (35 euros !). Notez l'importance de la somme pour une infraction aussi grave qui mettait, sans aucun doute, l'État français en danger ! A l’époque nous avions préféré en rire, nous étions aveugles et avions tort, nous n'avions pas voulu comprendre ; c’était le prélude, une répétition. Il fallait nous faire taire, nous réduire au silence pour avoir commis le crime inqualifiable, non seulement de dire qu'il était possible de guérir les malades mentaux mais de le mettre en œuvre en refusant les méthodes de traitements habituels de la psychiatrie. Vingt-cinq ans de travail assidu, pour élaborer une institution de soins inédite et exemplaire, en référence à la psychothérapie institutionnelle et à la psychanalyse. Avec une réussite telle qu’une enquêtrice de l’I.G.A.S.S. nous confiait (hors rapport officiel) que, si nos méthodes de soin étaient appliquées, il faudrait remettre en cause toute la psychiatrie française officielle ! Comment un pouvoir, et particulièrement l'État bureaucratique français, peut-il supporter les empêcheurs de penser, de manipuler en rond et qu'on touche, ne serait-ce que du bout d'un traitement ou d'une pilule, à son emprise ?

Vingt ans plus tard, dans sa lettre ouverte à Nicolas Sarkozy, le Docteur Michaël Guyader en apporte une illustration similaire et dramatique. Un meurtre, inacceptable comme le sont tous les actes de cette nature, sert à discriminer une population entière sous prétexte qu'il est commis par un malade mental. En s'adressant au Président de la République, il écrit : « [...] Vous avez donc, sous l'apparence du discours d'ordre, contribué à créer un désordre majeur, portant ainsi atteinte à la cohésion nationale en désignant à ceux qui ne demandent que cela, des boucs émissaires, dont mes années de pratique m'ont montré que justement, ils ne pouvaient pas se défendre [...] » Doit-on créer des lois spéciales pour les boulangers, les plombiers, les enseignants ou tout autre corporation parce que l'un de leurs membres aurait tué un passant ?
Le président de la République Française fait appel aux plus bas instincts de chacun de nous pour stigmatiser l'autre, le plus faible, l'étranger, le fou. Rappelons-nous que les nazis ont débuté leurs massacres avec les malades mentaux des hôpitaux allemands !

Comment conclure ?

Sommes-nous si loin de l'idéologie nazi ou bolchévique quand le mensonge et la falsification s'érigeait en norme et transformait des gens ordinaires, des braves gens en délateurs et parfois en tortionnaires ?

Nous n'en sommes pas là ? En êtes-vous sûr et surtout en France ? Le nazi et le communisme ont quitté notre monde, l'idéologie actuelle paraît plus gentille, inoffensive, elle n'emprunte pas les mêmes sentiers, elle ne s'affuble pas des mêmes oripeaux, elle veut notre « bien », notre « sécurité », mais quel est le prix à payer ? Elle parvient à nous faire croire que c'est ce que nous voulons, que c'est essentiel pour notre existence. Alexis de Tocqueville parlait de notre recherche de l'égalité jusques et y compris dans l'esclavage. Avec la « mondialisation » notre destin, notre vie nous échappe et semble remis à un monstre tutélaire qui va tout décider.
L'urgence est réelle de s'opposer à l'ère du contrôle diffus et généralisé qui aura atteint son but « lorsqu'il aura été suffisamment intériorisé pour faire de chacun le contrôleur de soi-même. » La prolifération de la micro-puce RFID ou identification par radio-fréquence, dont les citoyens réclament eux-mêmes l'implantation sous leur épiderme en est une illustration dramatique.

Soyons des veilleurs pour que le mensonge et la falsification ne passe pas par nous . Et «s'il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer », sans illusion aucune, prenons cette phrase comme la définition et la mesure de l'action humaine. Agissons sans attendre notre voisin ou une quelconque reconnaissance ou gratification.

Le Docteur Michaël GUYADER lors du rassemblement sur le Plateau des Glières du 17 mai 2009, commémorant avec des résistants la première bataille, à visage découvert, entre l'Armée de la France Libre et les milices de Vichy appuyées par un corps d'armée nazi déclarait :

« Résister : une ardente obligation en psychiatrie aujourd'hui […]« Le 2 novembre 2008, Nicolas SARKOZY, dont on aurait pu attendre que la fonction le transporte, s'est vautré dans le pire du discours attendu, des décisions vulgaires, des accusations à courte vue […] »

« Dans cette lutte constante pour œuvrer à la déstigmatisation de ceux qui souffrent

psychiquement et que l'on n'ose plus appeler les fous, un honnête homme eut suffi, c'est une fois de plus manqué et l'ardente obligation de résister contre ce que le discours dominant a de pire reste une impérieuse nécessité. »

René Char écrit : « Les esclaves ont besoin d'esclaves pour afficher l'autorité des tyrans. »

« Nous n'en ferons naturellement rien et continuerons à résister !
Il ne s'agit pas pour nous de prendre les armes mais l'éthique impose de ne pas appliquer les lois scélérates ; Monsieur Alain Refalo nous a donné à tous une voie à suivre, celle de la désobéissance citoyenne qui dit non à l'application des lois déshonorantes.

André Malraux, inaugurant le monument de Gigioli en 1973, disait : « Les ombres inconnues qui se bousculaient aux Glières dans une nuit de Jugement Dernier n'étaient rien de plus que les hommes du Non, mais ce Non du maquisard obscur collé à la terre pour sa première nuit de mort suffit à faire de ce pauvre gars, le compagnon de Jeanne et d'Antigone. L'esclave dit toujours oui. »

« Continuons donc, nous avons du travail devant l'absurdité bornée du discours dominant, nous avons à inventer le monde de demain où il ne serait pas interdit de crier « vive l'espérance !».

Continuons donc. »

Guy Delaunay (Juin-Juillet 2009)

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1 Citation rapportée par le Docteur Michaël GUYADER, Psychiatre des Hôpitaux, Psychanalyste – Intervention au Plateau des Glières, en mémoire de la résistance française, 17 mai 2009

2 Mission Interministérielle de Vigilance et de Lutte contre les Dérives Sectaires, (dépendant du Premier Ministre).

3 D'après CAP LC (CAP pour la Liberté de Conscience - Liberté de Religion - Liberté de Conviction). 26/02/08.

4 Allusion à une première liste, à l'initiative de l'Adfi et de la Mairie de Paris, visant à répertorier tous les lieux « susceptibles » d'abriter des groupes minoritaires « dangereux » dans la capitale. Autant de lieux désignés à la vindicte !

5 L'article a pour titre : « L'imaginaire pirate de la mondialisation », p. 154 et ss.


6 Voir l'article de Marcela Lacub sur www2.cnrs.fr:80/presse/journal/1236.htm.

7 Faits rapportés par le pasteur Jean-Claude Basset, lors du Congrès du CICNS en septembre 2007 à Paris

8 Cf le projet de Loi Bachelot mai 2009, voté au Sénat.

9 Que ce rejet de la loi Hadopi soit le fait d’une manœuvre de l’opposition n’y change rien.

10 Séminaire Livre VII, L'Éthique, p. 338

11 De la Démocratie en Amérique, T2, p.103

12 Séminaire Livre VII cité, p. 367.

13 A l'échelon d'un continent, regardons le pillage de l'Afrique par les sociétés internationales ; jusqu'en 1980, les pays africains étaient auto-suffisants quant à leur alimentation !

14 Ces informations sont accessibles sur : http://www.coordiap.com/cep2006.htm

15 Ancien magistrat, condamné pour « injures raciales » en 1998. Député du Rhône depuis 2002, réélu en 2007, son élection est invalidée par le Conseil Constitutionnel ; inéligible pour un an pour infractions sur ses comptes de campagne. Ce qui n'empêche pas Monsieur FILLON, duquel il dépend, de le nommer, fin 2008, président de la Miviludes

16 Tout ceci relevé, comme aurait pu le faire n’importe quel journaliste d’investigation, sur La Chaîne Parlementaire LCP Info en octobre 2006 ! Cf le site http://www.coordiap.com/cep2006.htm

17 La commission précédant la Miviludes (Mils : Mission Interministérielle de Lutte contre les sectes). Appellation abandonnée parce que, oh paradoxe !, le mot secte est trop précis et embarrassant, on ne peut pas lui faire dire n'importe quoi.

18 Interview du CICNS de juillet 2009.

19 Spécialiste français des études sur la laïcité à l'École Pratique des Hautes Études.

20 Cf les travaux du CICNS, déjà cités.

21 Dans une interview du 07/07/2009 sur France-Info, Raphaël LIOGIER prend le contrepied de la majorité des internautes interrogés qui veulent que le port de la burkha soit interdit par la voie législative. Il affirme que c'est une affaire de croyance personnelle, que nous n'avons pas à nous arrêter à nos opinions ou rejets personnels devant une telle manifestation et, tant que la loi est respectée, l'État n'a pas à s'en mêler. Il ajoute que des études sociologiques récentes montrent même que des jeunes femmes cultivées souhaitent porter ce voile par choix personnel en envisageant des carrières d'avocates ou de médecins... Encore une fois, dit-il, si le port de cette burkha porte atteinte à la paix sociale ou aux lois de la République, les lois actuelles suffisent amplement.

22 Cité par le CICNS – novembre 2007

23 Centre Contre les Manipulations Mentales

 

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