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A propos de l'utilité publique de l'Unadfi

par Christian Paturel

Mars 2008

 

«Pourquoi ainsi et pas autrement »
Paul Valéry

L’Unadfi a été reconnue d’utilité publique par un décret en Conseil d’Etat du 30 avril 1996.

Il existe environ mille associations reconnues d’utilité publique (les « ARUP ») en France. Elles contribuent activement à la satisfaction de l’intérêt général : elles protègent et aident les démunis, (Abbé Pierre, Restos du cœur…), elles militent pour la paix dans le monde, elles luttent contre les maladies et pandémies…

Mais, qu’en est-il de l’Unadfi ? Le décret du gouvernement de l’époque lui accordant l’utilité publique était-il justifié ? N’a-t-il pas été pris dans un contexte disons… particulier ? Etait-il constitutionnel au regard de notre bloc de libertés publiques ? Convient-il aujourd’hui de maintenir cet état de fait et de considérer que l’Unadfi fait partie de notre cadre institutionnel, de notre paysage républicain au même titre que le Parlement, la Sorbonne, l’Académie française… ?

Voici quelques éléments de réflexion (I), avant d’envisager une action (II)

I QUELQUES ELEMENTS DE REFLEXION

La reconnaissance d’utilité publique n’est accordée que lorsque certaines conditions, fixées dans le décret du 16 août 1901 sur les associations et surtout par la jurisprudence du Conseil d’Etat, sont remplies, notamment :

. l’adoption de statuts types impliquant que l’objet social ne soit pas contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs,

. « l’intérêt public de l’association »,

. « son indépendance »,

. son « rayonnement dans le temps et dans l’espace »,

. « la disposition de ressources suffisantes ».

Le bon sens rejoint le droit pour affirmer que ces conditions n’étaient pas réunies en 1996. Elles le sont encore moins aujourd’hui. D’une part, l’action virulente et intolérante de l’Unadfi (dans l’arrêt Paturel c France, la Cour européenne des droits de l’Homme, évoquant ladite Unadfi précise que cette dernière ainsi que les autres structures opérant dans le même champ d’action « doivent faire preuve d’un plus grand degré de tolérance » arrêt du 22 décembre 2005 par 46),d’autre part, son influence négative auprès de certains parlementaires en mal de renommée, ont suscité l’indignation de la communauté internationale (voir notamment les rapports annuels de l’ONU).

L’Unadfi, fortement embarrassée par les critiques et interrogations de nombreux Etats étrangers et organisations internationales, a jugé opportun de modifier sa raison sociale en « union nationale de défense de la famille et de l’individu victimes de sectes ». Cette nouvelle dénomination semble recadrer, rendre politiquement correct son champ d’investigation. En réalité, il n’en est rien. L’Unadfi n’a modifié en rien son champ de tir, ses objectifs, ses procédés, ses méthodes basées sur l’amalgame, l’incitation à la délation, la discrimination. Chacun appréciera cet exercice de haute voltige politique…

Revenons aux conditions légales et jurisprudentielles exigées de toute association revendiquant un statut d’utilité publique.

1°/ Les « statuts types ».

S’agissant d’une association habilitée à se constituer partie civile dans les procès pénaux, l’objet social se doit d’être précis, limité et sans…ambiguïté. A défaut, ladite association détiendrait « l’action publique » (prérogative de puissance publique qui appartient au seul ministère public) et serait en droit d’intervenir dans tous les domaines de la vie sociale. Dangereux pour les libertés !

Les statuts, tels qu’ils étaient rédigés en 1996, interpellent toute personne dotée d’un élémentaire bon sens. L’Unadfi s’est donné comme objet social la lutte contre les « sectes ». Une notion que de toute évidence n’a pas et ne sera jamais définie sur le plan juridique. Une notion qui varie dans l’espace (dans les pays islamiques l’église catholique est une secte) et dans le temps (les premiers chrétiens étaient qualifiés de secte au premier siècle, l’Armée du Salut a subi la même condamnation…).

Le temps et l’expérience ont malheureusement prouvé que la qualification de secte relève du pouvoir discrétionnaire, de l’arbitraire de l’unadfi, en réalité d’une poignée d’individus. Ces derniers, dans leur dérive et aveuglement, n’hésitent pas à dénoncer comme secte justifiant une « mise à l’index social », des mouvements que la Cour européenne des droits de l’Homme qualifie par ailleurs de…religions (Témoins de Jéhovah et Eglise de Scientologie, par exemple).

Avec de telles conceptions, il est possible de dénoncer et de mettre au banc des accusés toute association, tout groupement, tout organisme, toute entreprise commerciale… intervenant dans les domaines les plus divers (philosophiques, médicaux, sociologiques…) en les qualifiant de « secte ». Le procédé est douteux et procède d’un comportement irresponsable. En tout état de cause, il est attentatoire aux libertés et dangereux pour la démocratie, l’unité nationale et la sécurité des personnes et groupements mis en cause sous la dénomination de « secte », un terme qui, étymologiquement neutre à l’origine, devient alors chargé d’anathème.

L’opinion publique est en droit d’attendre plus de légalisme, de rigueur, de tolérance, de sérieux de la part d’une association reconnue d’utilité publique (ARUP).

2°/ « L’intérêt public de l’association ».

Le principe de laïcité figure expressément dans notre Constitution de 1958. Qu’une association loi 1901 lutte contre les religions, les thérapies, les philosophies, le spirituel… libre à elle. Cette possibilité fait partie du débat démocratique qui ne peut être que contradictoire. Mais, lorsqu’un Etat laïc accorde la reconnaissance d’utilité publique à une telle association, nous sommes alors en présence d’un « acte contre nature » au sein d’une démocratie libérale. Cette monstruosité constitutionnelle ne disparait pas malgré les efforts, aussi constants que vains, de l’Unadfi pour démontrer son équation virtuelle : secte = escroquerie = criminalité = dangerosité, ou pour accréditer l’idée selon laquelle des dizaines de milliers d’enfants seraient « prisonniers des sectes ».

Le Conseil d’Etat a précisé que ne pouvait être reconnue d’utilité publique une association ayant un objet politique, confessionnel ou dont le but est la satisfaction des intérêts particuliers de ses membres.

Mme Jeanine Tavernier, présidente de l’Unadfi de 1993 à 2001, a reconnu, dans une interview donnée à Xavier Ternissien : «L’association a été fondée par des personnes d’origine catholique (…) Petit à petit, beaucoup de francs-maçons sont entrés à l’Unadfi, lui donnant une coloration qu’elle n’avait pas à l’origine » (journal Le Monde du 16 novembre 2006). En 1996, la nature confessionnelle de l’Unadfi, du propre aveu de Mme Jeanine Tavernier, était incontestable et interdisait toute reconnaissance d’utilité publique. Aujourd’hui que la direction est assurée par l’aile dure de la franc-maçonnerie, l’objet de l’unadfi est devenu politique et prône une laïcité de combat, son but est « la satisfaction des intérêts particuliers de ses membres ». L’opinion publique est en droit d’attendre plus de transparence, de respect des valeurs républicaines de la part d’une association reconnue d’utilité publique.

3° « L’indépendance »

Le Conseil d’Etat exige qu’une ARUP soit indépendante à l’égard des personnes privées et des personnes publiques. S’agissant des personnes privées, compte tenu des développements précédents, qu’il soit permis de douter de cette indépendance. S’agissant des personnes publiques, compte tenu de l’importance des subventions publiques (nos impôts) versées à l’Unadfi, il est difficile, même avec la meilleure volonté, d’affirmer que cette dernière ne dépend pas des pouvoirs publics. Depuis 1982, tous les rapports parlementaires portant sur la question des sectes ont démontré l’osmose entre l’Unadfi et les pouvoirs publics..

Ce constat ne manque pas de soulever une nouvelle question : comment un Etat qui a signé de la main droite la convention européenne des droits de l’Homme (en 1973) et la charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne (en 2000), textes qui garantissent la liberté de conscience, de pensée et de religion… peut-il, de la main gauche verser des subventions publiques à une association qui refuse ces mêmes libertés à certains mouvements ? Mouvements qui, nous le rappelons, sont soigneusement choisis par décision discrétionnaire de l’Unadfi (une application moderne et laïque du dogme de l’infaillibilité).

L’opinion publique est en droit d’attendre plus d’autonomie, d’indépendance, de droiture de la part d’une association reconnue d’utilité publique. Elle est en droit de formuler les mêmes exigences à l’égard de l’Etat français.

4° « Le rayonnement ».

Il serait abusif de comparer le rayonnement des Restos du cœur, de la Fondation abbé Pierre qui font l’objet d’un consensus national et…l’Unadfi qui est à l’origine d’une marginalisation (donc d’une discrimination) d’une partie de la population qui comprend des femmes, des hommes et… des enfants. L’opinion publique est en droit d’exiger qu’une association reconnue d’utilité publique soit un instrument d’unité et de solidarité nationale, non un outil de division. Les sources de dislocation du tissu social sont déjà suffisamment nombreuses sans qu’il soit besoin de les accentuer. Est-il besoin d’évoquer le problème des cités, du chômage des jeunes, de la fragilisation et de la marginalisation de nouvelles populations, de la multiplication des actes racistes et antisémites… ? Liste malheureusement non exhaustive.

Doit-on tolérer plus longtemps ce disfonctionnement démocratique ? Est-il admissible qu’au sein d’une république libérale et laïque une telle association puisse être d’utilité publique ? Ne serait-il pas opportun de remettre en cause un statut aussi injustifié ?

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