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CAP Liberté de Conscience - Liberté de religion - Liberté thérapeutique

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Instruction sous surveillance

Par Gilles Carat
mars 2011

 

 

Au-dessus des lois ?

On parle à nouveau d’une commission d’enquête parlementaire, cette fois-ci « sur les pratiques intégristes, fondamentalistes et sectaires portant atteinte aux lois, aux principes et aux valeurs de la République dans des établissements privés d’enseignement, qu’ils soient sous ou hors contrat, et sur les moyens de contrôle qu’exerce l’éducation nationale sur ces pratiques ». La résolution, déposée le 3 mai 2011, prend soin de préciser que Ces pratiques sont minoritaires et autant politiques que religieuses. Elles doivent être combattues avec la plus grande fermeté, car en se plaçant ‘au-dessus’ des lois de la République, elles portent atteinte aux libertés fondamentales, aux droits de l’homme et, plus particulièrement, aux droits des femmes....Tous les intégrismes y sévissent... Pour les combattre, il faut les repérer, les connaître, les mesurer. En commençant par celles qui concernent nos enfants dans le cadre de la mission première de la République : l’éducation.

Comme souvent, ce genre d’initiative réagissait à un fait divers médiatisé, à savoir une émission de télévision sur une école dite « intégriste », mais nous savons que depuis une vingtaine d’années, les écoles dites indépendantes de tous bords sont dans le collimateur.

Dans cette nouvelle campagne inquisitrice, on retrouve souvent l’expression « au-dessus des lois », qui semble justifier tout ce remue-ménage.

De quoi s’agit-il exactement ? Sommes-nous en présence de lois non respectées ? Et si le délit est avéré, pourquoi lancer une coûteuse commission parlementaire ? S’agit-il d’un simple problème judiciaire ou d’une nouvelle campagne idéologique sous couvert « d’ordre public et républicain », une nouvelle chasse aux sorcières qui ne dit pas son nom ?

On peut craindre cependant que le but ne soit pas de garantir une éducation de qualité, à supposer que ce genre de volonté ne soit pas morte, mais plutôt de combattre certaines idées, quelle que soit l’éducation donnée et, quand bien même celle-ci serait excellente, afin de tourmenter ou carrément d’éradiquer certaines familles de pensée. ###

Mais au fait, que dit la loi ?

On constate (ou l’on découvre, après toutes ces campagnes d’intimidation) que la loi est très ferme sur les grands principes, mais très libérale sur l’application. Sans être exhaustif (il existe toute une documentation sur le sujet sur Internet), on trouve ainsi dans le préambule de la Constitution Française :

Article 26 :

1. Toute personne a droit à l'éducation. L'éducation doit être gratuite, au moins en ce qui concerne l'enseignement élémentaire et fondamental. L'enseignement élémentaire est obligatoire. L'enseignement technique et professionnel doit être généralisé ; l'accès aux études supérieures doit être ouvert en pleine égalité à tous en fonction de leur mérite.

2. L'éducation doit viser au plein épanouissement de la personnalité humaine et au renforcement du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle doit favoriser la compréhension, la tolérance et l'amitié entre toutes les nations et tous les groupes raciaux ou religieux, ainsi que le développement des activités des Nations Unies pour le maintien de la paix.

3. Les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d'éducation à donner à leurs enfants.

C’est assez clair. Les parents choisissent le genre d’éducation, ce qui implique qu’il y a plusieurs « genres ».

Quant à l’existence d’écoles hors du système public, on trouve :La liberté d’enseignement est un principe fondamental reconnu par les lois de la République, ayant donc valeur constitutionnelle (Arrêt du Conseil Constitutionnel du 23 novembre 1977).

On le sent, la liberté de l’enseignement est indissociable des trois libertés : de conscience, d’association et d’expression.

Enfin, dans la modification législative du 23 avril 2005 relative au contrôle des écoles indépendantes :

Article D131-12 (modifié par décret n°2009-259 du 5 mars 2009)

« La progression retenue pour l'acquisition de ces connaissances et compétences doit être compatible avec l'âge de l'enfant et son état de santé, tout en tenant compte des aménagements justifiés par les choix éducatifs effectués. Elle doit avoir pour objet d'amener l'enfant, à l'issue de la période de l'instruction obligatoire, à la maîtrise de l'ensemble des exigences du socle commun. »

Socle commun donc et minimum de valeurs citoyennes pour faciliter la vie en commun font bon ménage avec les « choix éducatifs ». Le droit des parents est contrebalancé par le droit de l'enfant à l'instruction.

Dans le secteur des écoles privées (pas forcément indépendantes), on trouve des écoles « sous contrat » et des écoles « hors contrat », sachant que l’attention se focalise souvent sur ces dernières, qui seraient propices à tous les vices. Notons cependant que pour obtenir le régime « sous contrat », une école doit exister depuis au moins cinq ans, et que toutes les écoles privées démarrent donc « hors contrat ».

Quel type d’enseignement ?

Pour l’instruction hors l’enseignement public (sous contrat ou hors contrat), on trouve quatre grandes généalogies :

- Les écoles dites « confessionnelles », qui ne sont plus limitées aux seules écoles Catholiques

- Les écoles de pédagogie nouvelle ou expérimentale,

- Les écoles de « performance »

- Enfin, on peut ajouter l’enseignement hors école, tels l’enseignement par correspondance qui a pris un nouvel essor récemment avec les exclusions d’élèves pour motifs religieux, et les enfants éduqués directement par les parents pour des motifs souvent multiples.

Certaines institutions quant à elles relèvent de plusieurs types (ex : écoles Waldorf (Steiner), les écoles dérivées des enseignements de Krisnamurti ou d’autres). L’ensemble de cet enseignement dit « libre » concerne 17 % des élèves en France, couvrant de la maternelle à la terminale.

Pour les écoles, il est existe une procédure de déclaration à diverses autorités, et une inspection annuelle. Pour l’instruction à domicile, c’est en gros la même procédure. Donc, tout cela est bien prévu et garanti par la loi. Les usagers et adeptes de ces alternatives y voient une plus grande écoute de l’enfant, un environnement sans violences inutiles, sans drogue, vers plus d’autonomie et de créativité de l’enfant, également une formation à une éthique véritable et consentie. La sécurité revient de plus en plus. Bref, les motifs des parents – et des enfants – pour un enseignement différent sont multiples et vont croissant.

Quels sont les problèmes recensés ?

Le détonateur de cette nouvelle Commission parlementaire annoncée aurait été des propos racistes ou favorables à des thèses fascistes entendus dans une école intégriste catholique. On peut cependant faire remarquer que ces écoles ne sont qu’une poignée, et on ne crée pas une commission parlementaire pour quelques écoles, au demeurant relativement bien identifiées. En réalité, ce prétexte permet de relancer une grande offensive, qui a été promise depuis longtemps par M. Vivien et ses confrères, ses « frères » devrions-nous dire, pour éradiquer ou neutraliser tout enseignement différent sous l’argument « sectaire ». Déjà, une polémique s’était élevée il y a quelques années sur les écoles bilingues bretonnes, toujours sur le motif sectaire.

En bref, selon ces gens un peu ... fanatiques, la République Française devrait gommer toutes ces différences pour... pour quoi au fait ? Car si l’on écoute les propres dires des acteurs de l’école Républicaine « dans la ligne », celle qui se veut le « ciment de la Nation » (loi de 2005), on ne peut pas parler de cris de victoire. En effet, dans son rapport de 2010, le très officiel Haut Conseil de l’Enseignement écrit à propos des collèges : « Le collège est aujourd’hui en panne » ...des performances médiocres croissantes, la France en tête des pays de l’OCDE pour l’échec scolaire, malaise croissant des enseignants (72 %), le temps de travail réduit à la peau de chagrin par la bataille disciplinaire incessante en classe, multiplication des actes de violence et incivilités, cyber-harcèlement des profs, niveau insuffisant des élèves qui sortent de l’école primaire.»

Quant à l’enseignement indépendant, que dit l’État du « problème » ? L’État, par la voix de ses ministères, a été on ne peut plus clair lors de la dernière commission parlementaire sur les enfants et les risques de dérives sectaires (2006) : selon eux, tout cela est un « non problème ». En effet, beaucoup des problèmes dans lesquels se débat l’enseignement public sont résolus dans ces écoles. Néanmoins, lorsqu’une communicatrice de l’Élysée a osé le dire dans une interview, les loups sont sortis du bois, la direction du Grand Orient en tête, pour crier au scandale.

Quel scandale ? Le scandale, c’est lorsque l’un des leurs, Président de la dernière commission parlementaire, s’était cru obligé dans son rapport de tronquer et falsifier plusieurs dizaines de déclarations de hauts fonctionnaires, tout en faisant disparaître les références légales citées par ceux-ci, afin de faire croire que ceux-ci abondaient dans son sens déjà tracé à l’avance, alors qu’ils étaient en complet désaccord. Comme l’affirmait l’Inspecteur général de l’Éducation Nationale devant la Commission parlementaire de 2006, j’ai l’habitude de dire pour l’Éducation Nationale que les enfants des Témoins de Jéhovah sont des … des élèves parfaits … ils sont parfaitement disciplinés, ils travaillent … c’est pas d’eux qu’on va avoir des problèmes. Horreur parmi les membres de la commission.Pour résumer, on rencontre beaucoup de problèmes dans l’école républicaine et très peu en dehors.

Une logique de « présumés coupables »

Toute cette offensive tourne autour de l’accusation de « sectarisme », concept attrape-tout, qui tend à désigner en creux tout ce qui ne se conforme pas à une certaine idée officielle de l’école et de l’éducation, idée fort éloignée d’ailleurs de la pratique. Suite à la fameuse commission parlementaire de 2006 sur les enfants, un projet de loi proposait déjà d’interdire l’éducation à domicile à regroupant plus de deux familles (et pourquoi ?), et remplaçait la notion de « maltraitance » par la notion de « danger », notion floue permettant toutes les interprétations idéologiques. La stratégie déjà ancienne de ces militants idéologues – qui n’ont souvent jamais mis les pieds dans une école indépendante – consiste à tenter dans un premier temps de contourner le droit, misant sur l’intimidation et le bluff afin de nier l’existence de celui-ci, pour ensuite faire modifier ces lois (dans un hémicycle vide) au mépris de la Constitution.

Toutefois, on peut noter fort heureusement que la cinquantaine de mesures de contrôle imaginée par une poignée de militants en 2006 (qui s’étaient auto proclamés membres de la Commission parlementaire sur les enfants à 3 heures du matin) a été majoritairement rejetée par l’Assemblée qui reste sensible dans son ensemble au respect de la constitution.

Enfin, signalons qu’une proposition de loi, dont la discussion est prévue pour le 9 juin 2011 prochain, viserait à remplacer dans les textes l’« instruction » obligatoire par la « scolarité » obligatoire. Toujours la redéfinition des lois pour banaliser la lutte idéologique.

Toutes ces campagnes relèvent de la propagande plutôt que des faits. Comme d’habitude, il n’y a pas de lois violées, et c’est bien cela qui gêne certains. Restons vigilants et ne laissons pas rogner les droits qui garantissent la liberté de conscience petit à petit, car ils sont justement constitutifs de cette civilisation que l’on essaie d’exporter à grands renforts de canons.

Gilles Carat


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