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 ENQUÊTES
CAP Liberté de Conscience - septembre 2009

 

 

LES SIKHS : VISAGES DE LA DIVERSITÉ

«Un Sikh porte la barbe. Ses longs cheveux sont soigneusement enveloppés dans un turban. Il a le teint d'un homme de race blanche bruni par le soleil de l'Inde. Il est honnête et courageux. C'est un bon guerrier. » Telle est l'image traditionnelle du Sikh.

Tout le monde sait aujourd'hui que les Sikhs constituent avant tout un groupe ethnique autant que religieux de plus de vingt millions d'adeptes qui ont essaimé un peu partout dans le monde, de nos jours on compte selon les sources jusqu’à deux millions de sikhs africians et quelques millers ou dizaines de milliers de Sikhs occidentaux.

Car après s'être diffusés pendant des siècles dans toutes les régions de l'Inde, de plus en plus éloignées du Pendjab, le berceau d'où ils proviennent, les Sikhs se sont glissés silencieusement au XXe siècle en Australie, au Canada, aux États-Unis, et plus récemment encore, en Grande-Bretagne et en France.

Il aurait pu en être autrement car en France, justement, les rédacteurs de la Loi du 15 mars 2004 prohibant les accessoires vestimentaires considérés comme « sigles religieux ostensibles » omirent de prendre en considération le cas des Sikhs, pourtant les premiers et les plus concernés par cette question puis que le turban qu'ils (ou elles) portent traditionnellement depuis des siècles constitue le principal marqueur ethno-religieux des Sikhs.

Invisibilisés depuis des décennies, ces derniers se sont vus menacer en tant qu'entité ethnique, religieuse et culturelle distincte par une telle évolution des stratégies de modernisation et de planification sociale, quel que soit le nom qu'on leur donne.*

Les Sikhs,qui sont une dizaine de milliers dans notre pays, très majoritairement arrivés comme réfugiés politiques dans les années 1980 et rejoints par leurs familles quelques années plus tard, auxquels s'ajoute une poignée de Sikhs Blancs, des français de souche « convertis ».

Il existe en effet dans l'univers du-sikhisme, un certain nombre de courants habituellement qualifiés de « sectes » , terme qui en français a des connotations beaucoup plus péjoratives que le concept civilisationnel indien de sampradaya (transmission) auquel il renvoie.

De l'une on rencontre donc des disciples en France, vêtus de blanc et portant, hommes et femmes, un haut turban blanc. Le guide spirituel en fût Harbhajan Singh Puri dit Yogi Bhajan (1929-2004).

Ils n'avaient en effet d'autre choix que celui de résister à l'application sans discernement de la loi de 2004 et un mouvement s'est organisé pour obtenir que les lycéens sikhs puissent fréquenter leurs établissements sans avoir à se découvrir complètement la tête et aussi pour que les adultes puissent continuer à faire figurer sur leurs papiers d'identité une photographie sur laquelle ils portent le turban.

Ce mouvement n'a pas été conçu et coordonné comme un combat communautariste voire confessionnel.Il restera dans l'Histoire comme un exemple supplémentaire de la contribution multiforme et très aboutie des Sikhs à l'humanitas planétaire.*

Au XXIe siècle, les Sikhs oeuvrent en effet dans le monde entier pour la coexistence harmonieuse de tous les systèmes de croyance avec l'absence de croyance au sein de sociétés où l'expression de la diversité culturelle et religieuse soit considérée comme une richesse, un facteur de paix et un signe de tolérance.

Or les imbroglios vestimentaires se succèdent à intervalles réguliersnon seulement en France mais dans le monde entier.

Ce climat d'intolérance qui tend à se généraliser a sans nul doute eu comme catalyseur le débat tronqué qu'il y a six ans a donné lieu à la promulgation de la loi bâclée du 15 mars 2004 et les dégâts collatéraux qu'elle a occasionnés.

Des enfants se sont vus refuser l'accès à l'Ecole publique par l'Etat qui se voulait le garant des Droits Humains et l'héritier de la philosophie des Lumières non pour ce qu'ils faisaient mais pour ce qu'ils étaient dans le refus de tout accommodement raisonnable pourtant considéré comme un devoir en matière de lutte contre la discrimination par la Commission Européenne.

Cette entorse grave à la construction d'une société démocratique et inclusive était-elle une dérive circonstancielle ou le fruit d'une incapacité structurelle à assumer l'altérité et l'universalité de la dignité humaine ?

De nombreux responsables politiques ou religieux, des philosophes ou encore des spécialistes des sciences humaines se sont manifestement posé la question sans relâche depuis six ans.

Au plan national, ce devait être une loi d'intégration, elle a donné lieu à la création d'une foison d'écoles confessionnelles. Les familles qui le pouvaient ont envoyé leurs enfants poursuivre leurs études dans d'autres pays, souvent européens d'ailleurs.

Dans son dernier ouvrage paru, l'anthropologue Maurice Godelier souligne à ce sujet que communauté et société ne forment pas nécessairement des entités équivalentes et rivales au regard des sciences sociales, il rappelle également:

« Bien entendu, lorsqu'un groupe humain se voit interdire l'accès à l'école du fait d'un aspect de son identité, c'est cet aspect ...qui passe, au yeux des autres, mais pas forcément à leurs propres yeux, au premier plan, refoulant les autres à l'arrière-plan, réordonnant et subordonnant toutes les autres identités que recèle chaque groupe humain et chaque individu »

Cette constatation illustre parfaitement la légitimité des craintes collectives quant à l'homogénéisation des modes de vie et de pensée.

Au plan international, c'est le spectre du choc des civilisations qui nous hante. Le lobby laïque français pourrait bien de ce point de vue avoir initié une spirale infernale.

Seule la réaffirmation de l'universalité du contrat moral des Droits Humains nous permettra de tourner définitivement le dos au choc des civilisations.

La reconnaissance de la diversité culturelle comme composante essentielle des droits humains est un phénomène nouveau. Son cheminement, lui, ne l'est pas. Dès 1982, l'unesco lors de sa conférence mondiale de Mexico posa ou plus exactement reposa une définition de la culture comme: «l'ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs qui caractérisent une société ou un groupe social et englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les façons de vivre ensemble, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances. »

La réhabilitation de la notion large de culture donne son vrai sens aux notions de diversité culturelle, d'identité culturelle et de rapports interculturels. Mais plus de vingt ans, se seront donc écoulés avant qu'une configuration inédite d'acteurs -barbus et enturbannés pour certains cherche à convertir cette définition dela culture en un instrument juridique capable de soustraire l'ensemble des expressions culturelles à la seule règle dela marchandise.

Car c'est désormais aux citoyens qu'incombera la responsabilité de défendre les Droits Humains les leurs et ceux des autres, lorsque ceux-ci se trouvent menacés. Les États sont, en cette matière, entravés par leurs intérêts économiques et stratégiques. C'est pourquoi certains demeurent à la traîne tout en proclamant être à l'avant-garde.

Même si nous assistons manifestement à un phénomène nouveau: la formation d'une sphère publique qui cherche à conjuguer l'impératif de l'interculturalité avec le principe d'égalité. Une démarche historique au sein de laquelle les Sikhs étaient destinés dès l'origine, du fait de leur compréhension systémique du fait spirituel et de leur profonde tolérance naturelle, à jouer un rôle de premier plan.

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