Coordination des Associations et Particuliers pour la Liberté de Conscience
Coordination des Associations & Particuliers pour la Liberté de Conscience
line
CAP pour la Liberté de Conscience - Liberté de Religion - Liberté de Conviction
 
actualites
enquetes
revue de presse
vos droits
Aidez-nous
futur
publications
Point de vue
liens / links
telechargements
contacts
english version
CAP LC 2008
www.coordiap.com
 
 
 
shim  
 

ÉDITORIAL

Charlie Hebdo pour se faire hara kiri
par Paul Vinel
CAP Liberté de Conscience - octobre 2012

 

Pourquoi la polémique au sujet de la liberté d’expression suite à des caricatures publiées par le journal satirique Charlie-Hebdo ? Et que s’est-il vraiment passé ? Au départ un groupe américain de chrétiens extrémistes a réalisé une vidéo de présentation pour un film islamophobe « l’innocence des musulmans », film qui probablement n’a même jamais existé. Cette vidéo est mise en ligne mais est peu regardée, jusqu’au 8 septembre 2012 où un présentateur égyptien d’une chaine salafiste, Sheikh Khaled Abdullah, l’exhuma, provoquant des manifestations violentes dans de nombreux pays musulmans et de nombreux tués, dont un ambassadeur américain. C’est le moment qu’a choisi Charlie-Hebdo pour publier ses caricatures islamophobes. «Faut-il créer de la haine au nom de votre liberté d'expression? » C’est la question posée par Mohamed Azab, ancien professeur à la Sorbonne et conseiller du grand Iman de la mosquée Al-Azhar en Egypte.

Une première réponse légale est donnée par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, traité signé par la France et qui définit la liberté d’expression :

Alinéa 1 : toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n'empêche pas les Etats de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisations.

Alinéa 2 : l'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire.

La liberté d’expression doit donc répondre à des règles, comme ne pas nuire à la sécurité nationale et ne pas attenter à la réputation d’autrui. Le gouvernement français avait la possibilité de réagir. Il ne l’a pas fait, laissant un journal satirique porter la parole officielle de la France et mettre des français de l’étranger en danger.

Mais qui est Charlie-Hebdo et pour quelles raisons a-t-il jeté de l’huile sur le feu ? Charlie-Hebdo est l’héritier en ligne directe du journal Hara Kiri, fondé en 1960 et très vite interdit de parution. Celui-ci s’était revendiqué lui-même comme un « journal bête et méchant » ! Charlie Hebdo, son successeur, ne cache pas son opposition à toutes les formes de religiosité : le catholicisme en particulier, mais aussi les autres religions minoritaires et les sectes sont régulièrement ses cibles. Il est symptomatique de la mouvance laïciste à la française qui considère que les religions sont la cause de toutes les guerres et de tous les problèmes de société. Les croyances religieuses seraient contraires à la raison, Roger Ikor, fondateur du CCMM (Centre Contre les Manipulations Mentales), disait : « si nous nous écoutions, nous mettrions un terme à toutes ces billevesées, celles des sectes, mais aussi celles des grandes religions. » Les tenants de cette mouvance réclament « le droit au blasphème » au nom de la liberté d’expression : les caricatures de Charlie-Hebdo en sont une illustration. Dans un article paru dans le journal Le Monde, le théologien Raphaël Picon et l’islamologue Rachid Benzine décrivent ainsi la situation : « toute société dans son développement engage des processus de sacralisation qui sanctifient ses principes, valeurs ou interdits et les soustrait à l'interrogation. La liberté sacrée des uns se heurte à la figure sacrée entre toutes pour d'autres. Dès lors, la défense intransigeante de la vérité des uns ne se fait pas sans violence puisqu'elle heurte ce qui constitue le périmètre sacré des autres. » Le caractère sacré de la liberté d’expression face au caractère sacré des religions : une véritable bombe sociale que les extrémistes rêvent de faire exploser. Les gouvernements successifs n’ont rien fait pour la désamorcer.

Pourtant ce problème, pour délicat qu’il soit, n’est pas insoluble. A condition de le vouloir ! Il est possible de respecter à la fois la totale liberté d’expression et la totale liberté religieuse. Mais pour cela il faut d’abord s’opposer à « la bêtise et la méchanceté » façon Hara Kiri pour davantage d’intelligence et de subtilité. Ainsi pourquoi chausser des gants de boxe et asséner des insultes au prétexte de s’exprimer librement ? Les professionnels de la communication savent que la manière de s’exprimer est plus importante que le contenu du message à transmettre : il est possible de transmettre des messages forts tout en respectant ses interlocuteurs. Traiter ses interlocuteurs de « cons » va susciter leur colère. Dire « nous sommes choqués par vos manifestations et nous les estimons excessives par rapport à la réalité de la situation » satisfait à la liberté d’expression dans le respect de ses interlocuteurs et peut amorcer un dialogue constructif. Communiquer est un art difficile qui demande apprentissage et pratique constante.

Les musulmans ont souvent été critiqués pour accepter la présence en leur sein d’extrémistes. Mais la laïcité à la française comporte elle aussi ses extrémistes : ce sont les laïcistes. Ceux-ci ont détourné les valeurs de la laïcité pour exprimer leur rejet du religieux. Ignorer cette réalité, c’est risquer l’explosion sociale : se faire hara-kiri, le ridicule en plus !


 Partager

Sommaire des actualités

 

CAPLC -

 

 

CAP pour la Liberté de Conscience - Liberté de Religion - Liberté de thérapeutique